Troubles de la sexualité et hypnothérapie
Article de Jean Touati, hypnothérapeute
Août 2014
Compte tenu des règles déontologiques de respect du secret professionnel et de réserve vis-à-vis des patients, les prénoms ainsi que certains éléments biographiques ont été modifiés.
Je résume dans ce texte, au travers de vignettes cliniques, divers motifs de consultation en hypnose pour des troubles de la sexualité.
Ces vignettes cliniques nous montrent la diversité des troubles de la sexualité qui peuvent évoluer très favorablement sur une durée relativement courte par un traitement en hypnothérapie : Ejaculation précoce, Anéjaculation, Impuissance, Manque de libido, Vaginisme, Frigidité, Anorgasmie...
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Absence de désir, anorgasmie, frigidité et douleurs lors des rapports (dyspareunie)
A 30 ans, Nolwenn, me dit ne ressentir aucun désir sexuel. Elle ne sait pas si elle a déjà eu un orgasme et se plaint de sècheresse vaginale et de douleurs lors des rapports (dyspareunie). Mariée depuis quatre ans, Nolwenn désir avoir un enfant, mais n’a guère plus d’une relation sexuelle tous les deux ou trois mois où elle ne ressent aucun plaisir. Son conjoint ne semble pas frustré de cette situation et n'est pas davantage en demande. Nolwenn a consulté un sexologue qui lui a juste prescrit un gel pour sa sècheresse vaginale.
Carole, 54 ans, a été marquée par une enfance lourde de tristesse et de deuils impossibles : une partie de la famille de ses parents a péri dans les camps nazis et « la présence de ces morts » a plané sur chaque instant de sa vie. Elle a le sentiment jusqu'à présent de toujours « vivre avec ses morts ». Carole a connu plusieurs partenaires mais n’a jamais ressenti de plaisir lors de ses rapports sexuels et ne sait pas ce qu’est un orgasme. Elle n’a pas de tabou vis-à-vis de la sexualité mais n’arrive pas à se laisser aller et ressent régulièrement après quelques instants une sorte de prise de conscience, d'hyper-présence, ou elle s’observe comme de l’extérieur, ne ressent plus rien, attend avec impatience que son partenaire « finisse » tout en essayant de faire semblant. Carole a fait une psychanalyse durant une douzaine d’années sans amélioration sur le plan de sa sexualité.
Maria, 28 ans, me consulte pour une phobie sociale. De nationalité roumaine, en France depuis trois ans, Maria vit très isolée. Elle a pris un travail de femme de ménage bien en-deçà de ses qualifications pour volontairement limiter ses contacts sociaux. Elle apparaît mal à l'aise dans son corps, semble se cacher, se laisse aller à la gloutonnerie ce qui l'amène à s'empâter. Très douce et touchante, elle pourrait pourtant être plutôt jolie en prenant soin d'elle et en ayant plus confiance en ses capacités. Elle aimerait rencontrer un partenaire mais j’apprendrai qu’elle n’a jamais eu de rapports sexuels, connaît mal son propre corps et ne s’est même jamais masturbée. Elle ne sait donc pas ce qu’est de ressentir du plaisir sexuel et, bien sûr, encore moins un orgasme. Elle me précisera qu’en roumain la masturbation se dit, dans le langage courant, « l’auto-viol ».
Rachida, 28 ans, me dit qu’elle n’arrive pas à atteindre l’orgasme avec son partenaire et se pense frigide. Je comprends vite qu’elle jouit lors des caresses mais imagine que « l’orgasme » est exclusivement l’orgasme vaginal atteint lors de la pénétration. De nombreux cas mettent, comme ici, en avant une méconnaissance sur les pratiques sexuelles.
Vaginisme
Eglantine souffre de vaginisme. A 28 ans elle n’a jamais pu avoir une relation sexuelle avec une pénétration vaginale (vaginisme primaire). Elle raconte : « Je n’ai jamais eu de rapport abouti, j’ai vraiment mal, la pénétration est impossible. J’en ai toujours souffert, lors des rapports j’angoisse, je stresse, c'est très frustrant de ne pas maîtriser ça soi-même. Aussi j’ai tendance a rejeté tous les hommes, je suis sur la défensive et finalement je quitte mes partenaires lorsque ça devient trop compliqué. » Elle ajoute qu’elle n’a cependant pas de problème à prendre du plaisir, sans pourtant être vraiment sûre d’atteindre l’orgasme.
Elle a été suivie par une kinésithérapeute durant un an. Celle-ci lui a fait faire des exercices de respiration et de relaxation ainsi qu'un travail de rééducation périnéale à l'aide d'une sonde vaginale. Il lui a également été conseillée de poursuivre ce travail par elle-même avec un kit de dilatateur progressif mais elle n’a pas pu aller au-delà de la taille 4 sur 6. Elle a également consulté un sexologue mais me dit, sans trop détaillé, que cela n’a pas été trop concluant.
Elle est bien consciente que cette contraction involontaire des muscles du périnée, qui en resserant le vagin, empêche la pénétration, relève certainement d'une dimension psychologique. Elle évoque une famille « compliquée » ; dernière d’une fratrie de quatre filles et trois garçons, la fille aînée a subi un viol dans sa seizième année, alors qu’Eglantine était encore dans sa petite enfance. Aussi elle pense avoir été marquée par une mére anxieuse et surprotectrice vis-à-vis de ses filles. Dans cette même période une autre de ses sœurs a été victime d’un accident qui la laissa lourdement handicapée physiquement et totalement dépendante. Elle a grandi au côté de cette sœur immobilisée dans un fauteuil, et qui vit toujours, 25 ans après, chez sa mère. Elle raconte cela, ainsi que la séparation tardive de ses parents, sans laisser paraître trop d'émotion excepté sa nature anxieuse que confirme Eglantine lorsque je lui en parle. En effet de nombreux troubles de la sexualité se manifestent comme une somatisation d’un trouble anxieux.
Cas clinique détaillé Traitement du vaginisme en hypnose
Anéjaculation et incapacité pour l'homme à accomplir l'acte sexuel
Charlotte, 27 ans, vit depuis trois ans avec son petit ami. Pour lui, il s'agit de sa première partenaire et, à 30 ans, il n’a jamais eu de relations sexuelles avant de la connaître. Mais durant ces trois années, il n’a jamais pu avoir une relation sexuelle avec une pénétration vaginale, ni atteindre l’orgasme par caresses de sa partenaire (bien qu’il puisse éjaculer en se masturbant). Après leurs tentatives de rapports, toujours insatisfaisants, s'interrompant dans la gêne et l'incompréhension pour chacun d'eux, ils n'essayent plus guère, sans vraiment en parler, d'avoir des rapports et se contentent de gestes de tendresse. Charlotte, très frustrée mais très patiente et compréhensive imagine qu'elle a une part de responsabilité. Ils ont déjà consulté, en couple, un sexologue sans résultats. Je recevrai également son partenaire et ensuite le couple.
Théophile, 29 ans, vit en couple avec la première et seule jeune femme qu'il ait connue. Il souhaite avoir un enfant mais ne parvient plus à éjaculer lors de la pénétration de sa partenaire (anéjaculation), le rapport peut se prolonger sans qu’il ne puisse atteindre l’orgasme (bien qu’il puisse éjaculer en se masturbant). Théophile explique qu'il ressent au bout d'un moment, lors du rapport, une angoisse et a l'impression de s'observer ce qui l'empêche de se laisser aller.
Mathieu, 59 ans, n’a jamais pu éjaculer lors de la pénétration vaginale des deux femmes qu'il a connue. Il a du recourir à une insémination artificielle pour avoir un enfant. Lui aussi a été marqué dans son enfance par l’histoire de la Shoah vécue par sa famille et a également un long parcours psychanalytique.
Ejaculation précoce
Jérôme, 35 ans, vient me consulter car il craint que sa femme le trompe parce qu'il pense ne plus la satisfaire. Il me dit qu'elle est devenue vaginale et ne prend maintenant du plaisir que lors de la pénétration mais il n'arrive pas à « durer » assez longtemps avant d'éjaculer pour lui permettre d'avoir un orgasme. A l'instar d'un compétiteur, Jérôme parle de performance et d'objectif à atteindre lors de la relation sexuelle pour satisfaire son épouse.
Marié, un enfant, Philippe, 35 ans, me consulte pour des troubles anxieux et un manque de confiance en lui. Au cours de nos séances Philippe me parlera de son insatisfaction sexuelle. Il n'a quasiment aucun rapport sexuel avec sa compagne. Lors de leur premier rapport cette dernière « l'a engueulé », me dit-il, parce qu'il avait éjaculé trop vite et depuis il n'arrive pas à se retenir plus de quelques secondes après la pénétration vaginale. N'ayant pas connu d'autres femmes Philippe n'a pas trop de références et se perçoit comme faible et peu viril.
De nombreux hommes de tous âges consultent pour éjaculation prématurée (précoce). Souvent on retrouve, comme ici, ce souci de performance mais fréquemment des troubles anxieux et également une méconnaissance sur les pratiques sexuelles.
Addiction sexuelle, fétichisme, fantasmes
Richard, 40 ans, en couple avec trois enfants a l’obsession de se masturber devant des sites pornographiques. Il attend avec impatience que sa famille soit couchée pour retrouver ses passions iconographiques et se masturber. Richard ressent une certaine honte avec ses pulsions qui deviennent de plus en plus envahissantes et obsessionnelles.
Sylvain, 54 ans, en couple et se disant satisfait de sa relation avec son épouse, fréquente régulièrement les salons de massage où les « massages » se finalisent par une masturbation. Sylvain ressent cette pratique comme une dépendance dont il ne peut se défaire.
Antoine, 58 ans, vient me consulter à la demande de sa femme qui a découvert ses pratiques de travestissement fétichistes ; dès qu’il est seul chez lui, Antoine enfile des dessous féminins : bas nylon, slip et soutien-gorge, s’observe et se caresse dans cette tenue puis se masturbe. Il est surtout excité par le toucher du nylon sur la peau. Antoine n'a pas vraiment envie de se défaire de cette pratique bien qu'il ait du mal à s'imaginer vieillissant tout en continuant ainsi. Il voudrait surtout satisfaire la demande de son épouse ; celle-ci associe cette pratique à une « homosexualité refoulée » et n'arrive plus à avoir des rapports sexuels avec lui. Le DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) précise que le seuil entre dépendance et trouble mental peut être franchi lorsque la personne ressent une détresse importante face à son comportement, ou que ce dernier en vienne à nuire à son intégration sociale. Dans ce cas le trouble est diagnostiqué en tant que paraphilie. En cela, la pratique de travestissement fétichiste d'Antoine ne peut être considérée comme un trouble psychopathologique bien que cela nuise à sa relation avec son épouse.
Virginie, 24 ans, me consulte pour un certain mal-être, des angoisses et une relation complexe avec son père ; célibataire, celui-ci se comporte comme un copain et, notamment, se laisse aller à lui parler de sa vie sexuelle. Au cours de nos séances nous aborderons des questions liées à sa sexualité. Assez à l’aise pour en parler, elle me dit de manière assez drôle : « J’ai eu beaucoup de chance dans ma vie, j’ai eu beaucoup d’orgasmes. Mais je peux compter sur les doigts d’une main les fois ou j’ai pu atteindre l’orgasme sans imaginer que je suis entourée d’hommes qui se comportent d'une manière que la plupart des femmes considèreraient comme avilissante. » Cela l’embête car elle est très amoureuse de son compagnon et aimerait pouvoir penser à lui durant ses rapports sexuels.
Assumer son homosexualité
A 40 ans, Alexandre, marié, deux enfants, a décidé de vivre pleinement son homosexualité mais a du mal à assumer les conséquences de sa décision sur son couple et ses enfants. Il traverse une période où s'entremêlent des émotions ambivalentes : très excité par ses multiples rencontres gay et ce monde nouveau qu'il découvre, il vit d'autant plus difficilement la vie conjugale et ne supporte plus le moindre contact ou le plus simple geste de tendresse de sa femme. Alexandre n'imagine pas aujourd'hui lui annoncer son homosexualité et la fin de leur couple. D'autant plus que celle-ci est catholique très pratiquante et n'est pas indépendante financièrement. (il ne s'agit évidement pas d'un trouble de la sexualité mais d'une difficulté liée à l'identité sexuelle et à la vie de couple. Je rappelle que c'est seulement le 15 décembre 1973 que l'APA — American Psychiatric Association — a décidé par vote, suite aux pressions de mouvements gay et lesbiens et sur la base d'études sur l'homosexualité, de retirer l'homosexualité de la liste des troubles psychiatriques.)
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Autre texte
Traitement du vaginisme en hypnothérapie
Eglantine souffre de vaginisme. A 28 ans elle n’a jamais pu avoir une relation sexuelle avec une pénétration vaginale (vaginisme primaire). La thérapie d'Eglantine se déroula sur cinq séances s'étalant sur une période de deux mois. Quatre mois après nos séance elle m'écrira pour me dire : « Je crois que ça y est, je suis guérie, libérée et heureuse de l'être... Je me sens enfin femme et apte à la rencontre. »
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Bibliographie
DSM-V-TR, Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux. Paris : Masson, 2000